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La Débâcle
Livre numérique
Edité par ROBERT LAFFONT/BOUQUINS/SEGHER - 2019
Du 10 juin 1940, quand le gouvernement s'enfuit de Paris, au 17, où Pétain annonce la demande d'armistice, huit jours qui ont défait la France. " Le niveau d'essence dans le réservoir baissait dangereusement. Mme Perret se plaignait en permanence, se disputait avec Bernard qui voulait lui prendre la carte. À l'horizon en face de la colonne montaient de grandes lueurs orangées : un bombardement ? des dépôts de carburant en flammes ? Exténuée, sentant le mal au coeur revenir, gênée dans ses vêtements moites de transpiration, sa combinaison trop serrée, Jacqueline a fini par s'endormir, la tête sur l'épaule de la domestique et le chien sur ses genoux, bercée par les grincements d'essieux, les hennissements et le claquement des sabots, et un choeur de filles qui, quelque part derrière, chantaient du Tino Rossi... " Jetés sur les routes de l'exode, une famille de grands bourgeois, un soldat, un avocat fasciste, une femme seule et beaucoup d'autres, dans une vaste chasse à courre à l'échelle d'un pays où nul ne sait encore qui sonnera l'hallali. Avec La Débâcle, tout à la fois fresque au vitriol, road-trip hyperréaliste, chronique d'une débandade et récit initiatique, Romain Slocombe ajoute une pièce maîtresse à son grand roman noir national.
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Une migration pour cause de guerre
L'auteur nous avertit d'emblée : son livre est un roman, les personnages principaux sont inventés ; en revanche, les événements dont ils sont les témoins, sinon les acteurs, appartiennent à l'Histoire avec un grand "h". Il n'est que de consulter l'abondante bibliographie en fin d'ouvrage pour s'en convaincre. Ces événements, ce sont ceux qu'ont vécu un grand nombre de Français de la moitié nord du pays au cours de la semaine qui a précédé le discours de Pétain ("C'est le cœur serré...") en prélude à l'armistice. Les personnages, ce sont Lucien, combattant comme artilleur dans l'Aisne au début du roman, photographe au magazine "Vu" dans le civil, Hortense, sa fiancée, mannequin, les Perret, riches Parisiens dont le chef de famille dirige une société de production cinématographique, et le couple Guirlange, lui, beau-frère du précédent, avocat ouvertement pro-allemand. Tous, indépendamment, y compris Lucien obéissant dans un premier temps aux ordres de retraite reçus d'un commandement en pleine déroute, vont s'agréger à la gigantesque cohue qui se déplace tant bien que mal vers le sud, exposée aux bombardements et aux mitraillages. Certains, qui s'étaient donné rendez-vous, ne parviendront pas à se retrouver, d'autres, qui ne se connaissaient pas, se rencontreront fortuitement et feront un bout de chemin ensemble, essayant de s'extraire le plus vite possible, avec les moyens du bord, du théâtre de désolation et de mort qu'ils traversent... Tous n'auront pas la chance d'en sortir vivants : lors de ces jours de tous les dangers, il s'en fallait parfois de quelques centimètres à droite ou à gauche pour qu'une balle mortelle tirée par un Stuka hurlant vous frôle au lieu de pénétrer dans vos chairs, ou d'une seconde de réflexion et du choix d'une route plutôt qu'une autre pour échapper à un pilonnage.
Elie Olivier - Le 29 décembre 2019 à 13:07