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La passeuse des Aubrais, 1942
Vidéo numérique
Originaire de Varsovie, Abram Prazan arrive en France dans les années 1920. À Paris, il épouse Estera. Juive polonaise comme lui, elle vient d'un shtetl de la région de Lodz. Deux enfants naissent : Jeannette, en 1932, et Bernard, trois ans plus tard. Abram ouvre deux boucheries ; ses affaires tournent bien jusqu'à la guerre. Après la débâcle de 1940, la mise en œuvre par Pétain de la politique de collaboration avec l'occupant donne lieu à des lois antisémites. D'abord exclus de presque toutes les professions, les juifs sont ensuite spoliés de leurs biens, puis arrêtés et déportés. Dès mai 1941, Abram est interné au camp de Pithiviers dans le Loiret. Déporté à Auschwitz-Birkenau, il n'en reviendra pas. Pas plus qu'Estera, détenue à Drancy et déportée à son tour en juillet 1942. Gisèle, sa sœur, décide de faire quitter Paris à ses neveux, dont elle a désormais la charge. Elle les confie à une jeune femme qui doit les faire passer en zone libre. Grâce à elle, Bernard et Jeannette vont vivre…
Avant que Bernard, son père, n'accepte en 2006 de participer à une collecte de témoignages de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, l'écrivain et documentariste Michaël Prazan en savait peu sur ce qu'avait été son enfance meurtrie. Dans ce film en forme d'enquête, le témoignage de Bernard tient une large place. Alors septuagénaire, il raconte l'histoire de ses parents, sa vie d'enfant caché en zone libre, privé d'école et balloté de ferme en ferme. Mais il en dit peu sur la "passeuse" qui lui a fait franchir la ligne de démarcation, et sur les relations troubles de cette dernière avec le gestapiste français Pierre Lussac. Au terme de minutieuses recherches, le réalisateur parvient à la retrouver à Houlgate, sur la côte normande. Thérèse L., rescapée des camps, raconte à son tour. Fruit d'un patient travail d'enquête, de recoupements et de doutes, le film de Michaël Prazan représente aussi le vibrant cri d'amour d'un fils à son père.