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Le Banquet annuel de la Confrérie des fossoyeurs
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Edité par Actes Sud Littérature - 2020
Pour les besoins d’une thèse sur “la vie à la campagne au XXIe siècle”, un étudiant en anthropologie prend ses quartiers à La Pierre-Saint-Christophe, village fictif au bord du Marais poitevin, pour y observer les us et coutumes de ses pittoresques habitants – monsieur le Maire en tête, truculent patron de l’entreprise locale de Pompes Funèbres. Car ainsi va la grande Histoire : partout la mort saisit le vif – sauf pendant ces trois jours où elle marque une trêve, offrant à ses plus fidèles serviteurs un étourdissant répit : le Banquet annuel de la Confrérie des fossoyeurs.Où l’auteur de Boussole (Prix Goncourt 2015) investit le terroir de douce France, explore les ressources de son Poitou natal, exhume des trésors de culture populaire, et donne libre cours à sa fibre comique.
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S'enraciner dans le marais poitevin
Titre du livre oblige, la peinture du banquet constitue le morceau de bravoure de l'ouvrage, peinture rabelaisienne s'il en est, ce qui ne saurait surprendre puisqu'il se déroule à Maillezais, où l'auteur de "Gargantua" aurait vécu quelques années. Mais s'il occupe la partie centrale de l'ouvrage, ce tableau à la fois érudit (connaissant Énard, on ne s'en étonnera pas non plus) et haut en couleur n'en forme qu'une fraction, se rattachant un peu artificiellement aux autres morceaux par le biais de la géographie : presque toutes les histoires racontées dans le livre ont pour cadre la région natale de l'auteur, Niort et ses environs. Le roman débute (et se clôt) par le journal de bord d'un jeune ethnographe censé collecter dans cette campagne deux-sévrienne représentative de la ruralité française la matière de la thèse qui le propulsera au niveau d'une Jeanne Favret-Saada. Et parmi les personnes dont il recueille le témoignage figure le maire de la commune où il a élu domicile, qui gère également les pompes funèbres, en charge, cette année-là, de l'organisation du banquet... L'autre lien entre les histoires contées par Mathias Énard, qui parfois ressortissent à la grande Histoire, c'est la mort, justement, ou plutôt la réincarnation des âmes. Ce stratagème l'autorise à remonter le temps et à évoquer par exemple Agrippa d'Aubigné ou la bataille de Vouillé après avoir dépeint les affres éprouvées par un curé libidineux (malgré lui), dont l'âme, quittant le corps de l'homme d'Église à son décès, habitera derechef celui d'un jeune sanglier impatient de rencontrer une femelle. L'immersion progressive de l'apprenti ethnographe dans le pays niortais, son acculturation, favorisée par un rapprochement sentimental qui l'éloigne d'autant de sa petite amie parisienne, permet à l'auteur, qui plus est, d'aborder des questions actuelles comme celle des "bassines", ces retenues d'eau destinées à l'irrigation suscitant une certaine opposition. Bref, un livre un peu fourre-tout mais passionnant.
Elie Olivier - Le 29 décembre 2020 à 10:52